On retrouve dans les deux interviews le mot “sacrifice”, et donc le fait que la femme ait à faire un choix au moment de sa carrière. Mais les options ne sont pas les mêmes pour Fabrizio et Costanza. Pour Fabrizio, le sacrifice porte soit sur la carrière, soit sur la vie familiale : “ Vivre une vie dans laquelle on disparaît, avec des enfants de 7-8 ans : il y a certainement plus de femmes qui décident de ne pas monter la dernière marche qui fait que d’une vie gérable on passe à une vie de sacrifices”. Il laisse entendre qu’une vie de “top manager” porte à faire des sacrifices sur sa vie familiale, et donc de moins voir ses enfants, ce qui est un réel sacrifice pour la femme (on retrouve l’idée des rôles sociaux selon lesquels cela serait plus un sacrifice pour la femme que pour l’homme). A l’inverse, Costanza considère que le sacrifice est financier : ”la femme qui a une ambition de carrière doit faire des sacrifices, pas tellement en ce qui concerne la relation avec ses enfants (je suis convaincue que l’un n’exclut pas l’autre), mais du point de vue économique. Pour une femme qui travaille dans une ville autre que sa ville d’origine, qui ne peut pas compter sur le soutien de la famille (grands-parents par exemple), décider de continuer à travailler à 100% et avoir des enfants implique, pour une certaine période de temps, transférer le salaire pour payer la baby-sitter.” Elle reste d’ailleurs consciente que ce n’est pas possible pour toutes les femmes. Costanza semble ici plus détachée des rôles sociaux que F. Sadun puisqu’elle ne mentionne pas de la culpabilité dont parle Marie Wilson. Costanza précise tout de même: “Puis, en regardant les femmes avec qui je travaille encore aujourd’hui, beaucoup d’entre elles ont choisi de ne pas avoir d’enfants”. Ces femmes ont donc accepté le fait qu’elles ne puissent pas tout avoir.
Les facteurs internes et la confiance en soi
Nous avons tout de suite remarqué, après la lecture des deux interviews, que Fabrizio n’avait absolument pas parlé des facteurs internes comme la confiance en soi, contrairement à Costanza qui a abordé la question par « Je voudrais aussi démystifier le fait que les femmes seraient plus réticentes à parler : moi franchement je ne dirais pas cela, si je m’en réfère à mon expérience ». Elle parle ici d’une idée reçue qui est que les femmes ont plus de mal à prendre la parole en public, et semble convaincue qu’elle ne soit pas vérifiée. Costanza se corrige cependant tout de suite: «Peut-être qu’elles sont plus réticentes à parler de choses qu’elles ne connaissent pas ». En effet, et toujours dans la thématique de la confiance soi, les femmes ont plus de mal à parler de choses sur lesquelles elles sont moins à l’aise. On retrouve ici le phénomène du syndrome de l’imposteur : si les femmes pensent ne pas connaître le sujet, elles ne vont pas donner leur avis dessus. Ce syndrome, s’il est lié au manque de confiance en soi des femmes, est renforcé par les réactions que peuvent recevoir les femmes dans certains milieux. Costanza elle-même a reçu des remarques qui pourraient diminuer sa confiance en soi, dans la mesure où elle travaille dans des milieux traditionnellement «masculins»: le fait de penser qu’elle est moins compétente lorsqu’elle se rend dans une usine liée à l’industrie automobile ou quand elle nous précise que: «a banque est un environnement assez misogyne, il y a souvent le “petit commentaire” sur la femme ».
Nous retrouvons également, dans l’entretien de Costanza, les propos de Sheryl Sandberg sur la difficulté des femmes à négocier leur salaire : « C’est vrai que cela (le gender gap salarial) vient des capacités personnelles à négocier des augmentations, des promotions, peut-être en cela les femmes sont moins fortes. Personnellement, je pense avoir toujours demandé quand je pensais que ça m’était dû, parfois j’ai reçu des oui, parfois des non. ». Costanza nuance généralement ses propos et ne fait jamais de sa situation une généralité, elle est consciente des difficultés que peuvent avoir certaines femmes dans cette négociation. Cette capacité à se sentir légitime est encore une fois liée à la confiance en soi et la construction de cette confiance en soi dans l’éducation, pendant laquelle, visiblement, le genre féminin est délaissé.
Enfin, Costanza conclut son entretien sur l’aspect «politique» d’une carrière. En effet, elle explique: «Peut-être que l’homme, encore une fois sans généraliser, est plus politique, plus attentif à la gestion des alliances, à la politique au sein d’une organisation; la femme a tendance à se concentrer davantage sur son travail, à devenir forte techniquement et à être moins politique, et peut-être qu’elle se trompe, dans le sens où, au sein d’une entreprise, il faut également créer son propre réseau». Nous pensons qu’elle exprime ici le manque de «flexibilité» abordé dans la deuxième partie. Cette application qu’ont les femmes à se concentrer plus sur l’aspect technique que l’aspect relationnel semble dans la continuité de leur application à respecter les règles à l’école. Encore une fois, le problème semble prendre ses racines dans l’éducation.
Pour finir sur la comparaison entre les deux entretiens, nous voudrions revenir sur la manière dont les deux «top manager» ont conclu sur la question de l’absence des femmes à des postes de dirigeants (outres les remarques sur la maternité qui, comme il l’a été dit, est le premier facteur qui semble empêcher les femmes d’accéder à des postes à hautes responsabilité):
CY:
«Le fait que les femmes soient moins concernées par la politique, les contacts dans l’organisation, ce qui est au contraire indispensable pour atteindre une position de premier rang. Les postes à haute responsabilité sont occupés par la personne qui est non seulement capable d’un point de vue technique, mais aussi qui a aussi de bonnes connexions».
FX:
«Je crois aussi qu’il existe un phénomène de cooptation au sein des classes dirigeantes, et le sommet étant fondamentalement masculin, ce mécanisme de coopération fonctionne plus facilement pour les hommes que pour les femmes».
@manu_scogna10
On retrouve dans les deux interviews le mot “sacrifice”, et donc le fait que la femme ait à faire un choix au moment de sa carrière. Mais les options ne sont pas les mêmes pour Fabrizio et Costanza. Pour Fabrizio, le sacrifice porte soit sur la carrière, soit sur la vie familiale : “ Vivre une vie dans laquelle on disparaît, avec des enfants de 7-8 ans : il y a certainement plus de femmes qui décident de ne pas monter la dernière marche qui fait que d’une vie gérable on passe à une vie de sacrifices”. Il laisse entendre qu’une vie de “top manager” porte à faire des sacrifices sur sa vie familiale, et donc de moins voir ses enfants, ce qui est un réel sacrifice pour la femme (on retrouve l’idée des rôles sociaux selon lesquels cela serait plus un sacrifice pour la femme que pour l’homme). A l’inverse, Costanza considère que le sacrifice est financier : ”la femme qui a une ambition de carrière doit faire des sacrifices, pas tellement en ce qui concerne la relation avec ses enfants (je suis convaincue que l’un n’exclut pas l’autre), mais du point de vue économique. Pour une femme qui travaille dans une ville autre que sa ville d’origine, qui ne peut pas compter sur le soutien de la famille (grands-parents par exemple), décider de continuer à travailler à 100% et avoir des enfants implique, pour une certaine période de temps, transférer le salaire pour payer la baby-sitter.” Elle reste d’ailleurs consciente que ce n’est pas possible pour toutes les femmes. Costanza semble ici plus détachée des rôles sociaux que F. Sadun puisqu’elle ne mentionne pas de la culpabilité dont parle Marie Wilson. Costanza précise tout de même: “Puis, en regardant les femmes avec qui je travaille encore aujourd’hui, beaucoup d’entre elles ont choisi de ne pas avoir d’enfants”. Ces femmes ont donc accepté le fait qu’elles ne puissent pas tout avoir.